Leçons de l'histoire

1) Une citation de Paul Valéry

L'histoire est le produit le plus dangereux que la chimie de l'intellect ait élaboré…  Il fait rêver, il enivre les peuples, leur engendre de faux souvenirs, exagère leurs réflexes, entretient leurs vieilles plaies, les tourmente dans leur repos, les conduit au délire des grandeurs ou à celui de la persécution, et rend les nations amères, superbes, insupportables et vaines. L'Histoire justifie tout ce que l'on veut. Elle n'enseigne rigoureusement  rien, car elle contient tout, et donne des exemples de tout. Que de livres furent écrits qui se nommaient: "la Leçon de ceci, les Enseignements de cela!…" Rien de plus ridicule à lire après les événements, que ces livres interprétaient dans le sens de l'avenir.  

Paul Valéry: Regards sur le monde actuel et autres essais, Gallimard Folios Essais 1990 p.35.

2) De la  Revue des deux Mondes  au Monde d'aujourd'hui

Dans  la Revue des Deux Mondes de 1894, on lit un article  d'un éminent expert qui  soutient,   par delà l'alliance franco-russe, la thèse selon laquelle le système des confédérations antagonistes ("Triple Entente" contre "Triple Alliance" , etc.) est "la plus sûre garantie de la paix", puisque "chacune des nations qui se concerte s'accoutume à accepter l'opinion des autres", et que "plus il y a d'alliés, plus il est difficile qu'ils s'accordent pour vouloir la guerre pour une même cause et au même moment".

Expérience faite, on n'oserait peut-être  plus défendre cette thèse aujourd'hui. Mais dans une histoire récente de la Guerre 14-18, parue dans le Monde, on apprend que l'échec de l'offensive de Lüdendorff en 1917 était "facile à prévoir", etc. 

On en revient  toujours à la fameuse explication  (épinglée par Flaubert) de l'issue malheureuse de la guerre de 1870 : "Pas étonnant qu'on l'ait perdue, la France n'était pas prête!"


Staline

3) Joseph Staline (ci-contre) : un petit souvenir de ma classe de Terminale (1948-1949 au Lycée du Parc à Lyon), cueilli dans le manuel: 

Emile Tersen (Professeur agrégé au Lycée Louis-Le Grand): Histoire Contemporaine: 1848-1939, Paris, Delagrave, page 721.

Mon prof  d'histoire était le jeune Jean Bouvier, alors dans toute son ardente foi communiste - il faisait ses cours revêtu de la blouse prolétarienne- et  déjà féru d'histoire quantitative: les crises cycliques, le krach de l'Union Générale,  etc..

4) Anecdote. A l'époque, le marxisme était fort à la mode. Je me jetai sur  l'ouvrage d'Henri Lefebvre  (dans la collection "Que sais-je?: le point des connaissances actuelles"), un plaidoyer élégant et persuasif.

Hélas! Je tombai sur    l'affirmation suivante: "Le projet de dépasser le  marxisme  n'a peut-être pas beaucoup de sens ni beaucoup d'avenir, parce que le marxisme est la conception du monde qui se dépasse elle-même [souligné par l'auteur]". Une pareille exagération me détourna définitivement de toute tentation. I have never been the member of any marxist party. Merci , Henri Lefebvre!

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